Ministre bruxellois, non peut-être !

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[Ce texte est une réédition du texte initialement intitulé « Quid des Bruxellois dans le Gouvernement Di Rupo« , rédigé par Caroline en tant qu’invitée, et publié par Mateusz le 9 décembre 2011]

Ce nouveau gouvernement [note: Gouvernement Di Rupo, décembre 2011] n’a pas encore eu le temps de prendre de décision que déjà sa composition fait couler beaucoup d’encre (ne fut-ce que virtuelle). Ainsi, il n’y aurait pas de Bruxellois. Ah! J’en compte trois. Trois qui étaient déjà d’ailleurs présents lors de la législature précédente : Laurette OnkelinxJoëlle Milquet et Steven Vanackere. A l’époque, rejoints par Guy Vanhengel, on avait au contraire insisté sur la sur-représentation de Bruxelles au kern, ces quatre-là étant tous vice-premiers par ailleurs (du jamais vu !).

Objection aujourd’hui : ces trois ne seraient pas Bruxellois « de souche ». Laurette
Onkelinx vient de Liège et vivrait à Lasne, Joëlle Milquet vient de Charleroi, tandis que Steven Vanackere serait pressenti comme gouverneur de Flandre occidentale. Ce qui signifierait que respectivement 5083 (2ème score communal ou 4 fois plus que la bourgmestre f.f.), 6240 (2ème score communal), ou 869 (soit 100 voix de plus que Bruno De Lille, depuis secrétaire d’Etat bruxellois) électeurs se seraient trompés, voire auraient été trompés lors des élections communales de 2006 (source).

Je précise d’emblée pour ceux qui l’ignorent encore qu’on ne peut pas me suspecter d’antipathie pour le mouvement bruxellois (cfr.), mais tirer un trait sur cette confiance accordée par les électeurs me choque. Désormais, pour être un vrai Bruxellois, il faudrait soit être né sur place, soit devoir justifier une certaine allégeance à la cause

Faut-il connaître les deux langues régionales officielles, tout en pouvant lire Bossemans et Coppenole en version originale, notre « schild en vriend » à nous, Zinnekes ? Peut-être faut-il également savoir quand tombe la fête de l’Iris (en fait, le 8 mai, date de la fin de la 2ème guerre mondiale, ce qui n’est pas exactement un symbole bruxello-bruxellois) ? En tous les cas, payer ses impôts dans la Région ne semble pas suffire. Après tout, on durcit bien les conditions de naturalisation, pourquoi Bruxelles ne ferait pas de même ? Qu’un électeur postule toujours que son voisin, électeur lui aussi, est un idiot m’a toujours dérangé. Des personnes ont estimé que ces trois candidats étaient capables d’exercer un mandat à Bruxelles, soit. Ce n’est peut-être pas le choix que j’aurais fait, mais le choix de mon voisin est tout autant respectable que le mien (sinon le mien perd sa valeur !).

On n’élit jamais les ministres

Autre commentaire entendu : ces trois-là ne sont pas issus du parlement bruxellois.
Désolée, mais je bondis. Petit cours de science politique accéléré.

Tout d’abord en Belgique, nous (enfin, je dis nous, mais cela ignore ici environ 1/3 des
résidents bruxellois qui ne disposent pas du droit de vote, parce qu’ils ne sont pas belges) élisons des parlementaires (pouvoir législatif), jamais des ministres (pouvoir exécutif). Le gouvernement est responsable devant le parlement, c’est la démocratie parlementaire. Formule on ne peut plus classique.

Deuxième point : il n’est donc pas nécessaire d’être élu ou de l’avoir un jour été pour être ministre. Cela peut faire hurler, mais c’est ainsi et c’est loin d’être une spécificité belge (voyez Dominique de Villepin en France). Les ministres n’en sont pas moins légitimes : ils rendent des comptes au parlement (donc à nous, la nation, celle de « tous les pouvoirs émanent de la nation », pas celle avec un grand N) qui dispose du droit de vie ou de mort sur le gouvernement. Par ailleurs, je vous offre un scoop : l’élection ne confère pas de compétence ; on peut être élu et bête comme ses pieds.

Enfin, troisième élément : la Belgique est une fédération. Chaque niveau de pouvoir, chaque entité, est totalement autonome pour l’exercice des compétences dont il dispose. La politique bruxelloise ne se fait donc pas au fédéral. On a assez vilipendé le parlement bruxellois, le traitant de parlement de municipalistes, pour reproduire ce schéma au fédéral. Par ailleurs, il serait malvenu de souhaiter que des parlementaires régionaux montent au gouvernement fédéral alors que l’on se plaint si souvent de la trop grande rotation des mandataires politiques, espèce instable et insatiable, toujours à la conquête d’un nouveau siège ailleurs. La composition du gouvernement fédéral est sans influence sur la composition du parlement régional et c’est heureux, car cela permet la stabilité nécessaire au bon déroulement des travaux parlementaires.

En résumé, le parlementaire tire sa légitimité de l’électeur; le ministre du soutien qu’il
reçoit du parlement, mais du parlement concerné. Toute contestation de ce principe remet finalement en cause le choix de l’électeur.

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