Le long tunnel de l’égalité hommes-femmes

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Tunnel
Tunnel (source: Freepik - vectorpocket)

Quand on vous dit tunnel, vous pensez à quoi ? Je pense tube, souterrain, obscur. Le tunnel de la Basilique (officiellement Léopold II) est le plus long de Bruxelles. Il recrache des voitures 365 jours par an (ndlr : sauf quand il est en travaux). Il permet d’aller à la mer ou de relier le nord de Bruxelles au centre-ville. Il remplace le viaduc de mon enfance. Quand il a été mis en service, je me suis toujours demandé si le canal pouvait s’y déverser en cas de fuite. Désormais, je le vois comme une interminable cheminée. Je suffoque en imaginant les gaz d’échappement qu’il faut y filtrer.

Un tunnel, c’est comme un mort, sous la terre, pour toujours. On n’est plus dans l’enthousiasme des années 1980, du démantèlement du viaduc qui défigurait l’avenue. La voiture ne suscite plus les mêmes passions qu’à l’époque. On tente d’ailleurs de les interdire au maximum, de réduire leur trafic, leur vitesse, leur stationnement, bref leur pollution.

Dans ce contexte, l’idée de rebaptiser ce tunnel d’un nom de femme me surprend. J’ai toujours du mal à croire que l’idée est sérieuse. La voiture, c’est mal; on nous le serine en permanence. Les tunnels, même rénovés, c’est has been, un reliquat d’une époque que je croyais révolue. Et on voudrait donner plus de visibilité aux femmes avec un tuyau en béton qui file de l’asthme et des maladies respiratoires ? On ne peut donc pas l’associer à une femme réputée pour avoir fait une chose positive, encore moins à une femme à l’origine d’une découverte médicale.

Le bout du tunnel

On n’envisage pas non plus de donner le nom d’une femme vivante à un tunnel. Dans un tunnel, la seule lumière qu’on voit, c’est celle du bout, et dans le tunnel de la Basilique, il est fort fort loin. On ne peut l’associer à une femme optimiste. Le baptiser du nom d’une femme décédée, d’un autre côté, n’est-ce pas l’enterrer une deuxième fois ? Les hommes au Panthéon en France, les tunnels pour les femmes en Belgique !

Un tunnel, ça ne se voit pas. C’est pour cette raison qu’ils ont été creusés. Honnêtement, la seule visibilité qu’un tunnel bruxellois peut offrir à une femme, c’est au radioguidage.

Ah, mais me direz-vous, c’est une première tentative de démocratie participative. Oui, c’est quasi pour du beurre; il n’y a pas de riverains à entendre. Ne serait qu’en l’absence d’enjeu qu’on peut rebaptiser un ouvrage urbain d’un nom de femme ?

Je vous passe les blagues graveleuses (Gorge Profonde) ou douteuses (Lady Di). Honnêtement, la seule option réaliste et symbolique en même temps est de le rebaptiser tunnel de l’égalité entre les femmes et les hommes.

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