Pourquoi le logement social n'est pas une solution

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La difficulté de se loger à Bruxelles est reconnue par une grande majorité de ses habitants. Les logements sont rares et de moins en moins accessibles. Normal, non seulement la population augmente mais le nombre de familles éclatées grandit. Cette double tendance pousse la demande à la hausse alors que l'offre ne suit manifestement pas. Christos Doulkeridis reconnait sur le site d’Ecolo que 50.000 ménages sont en attente d’exercer leur droit au logement.

La logique économique veut que si l'offre ne suit pas la demande, les prix montent. C'est ce qui arrive depuis des années à Bruxelles. Les habitants aux revenus les plus faibles ont donc de plus en plus de mal à se loger. Face à cette montée des prix, chacun y va de sa solution : déménagement en dehors de Bruxelles, sacrifice économique, colocationâ?¦

Nos hommes politiques qui ont toujours à cÅ?ur l'intérêt de la population, voire pour certains, l'intérêt de leurs électeurs, se sont dit qu'ils pourraient apporter leur solution : le logement social.  Le logement social est un logement appartenant, directement ou indirectement, à la collectivité.  Ces habitations sont mises à disposition de la population selon certains critères dont le plus important est le niveau de revenu.

Malheureusement, le logement social ne résout pas le problème inhérent du marché : le manque d'offre.  Il ne fait que rationner le logement. Ceux qui sont assez riches pour acheter/louer sur le marché ne sont pas concernés.  La demande de logement des plus pauvres n'est dès lors pas satisfaisable par l'offre existante.  Le logement social ne fait qu'attribuer une partie des logements disponibles à certains 'économiquement faibles'. Cela s'appelle du rationnement puisque toute la demande n'est pas satisfaite. A cela il faut rajouter que les classes moyennes se trouvent coincées entre les plus riches qui ont accès au marché et les plus pauvres qui reçoivent un logement à des conditions avantageuses. Tous les citoyens entre ces deux catégories se trouvent exclus. Ils sont alors obligés d'émigrer en dehors de notre région !

Comme pour tout rationnement, c'est une autorité supérieure qui décide des critères d'octroi des logements sociaux. Si les critères se veulent objectifs, ils ne le sont en réalité pas.  Ceux qui obtiennent un logement social sont ceux qui auront le mieux réussi leur lobby personnel : trouver le bon interlocuteur, tout faire pour satisfaire les critères requis, ne jamais lâcher prise, etc. Il y a donc iniquité alors que l'objectif premier du logement social est justement l'égalité. Comme quoi, l'enfer est toujours pavé de bonnes intentionsâ?¦  En effet, qui ne connait pas une famille ayant certainement droit à un logement social mais n'en disposant pas ?

Et pourtant, il existe des solutions plus simples et plus efficaces que le logement social. La solution la plus simple et la moins couteuse est de favoriser l'augmentation de la demande. En bref, tout faire pour qu'il y ait plus de constructions. Pourquoi d'ailleurs, dans une société prétendument capitaliste, une demande existante n'est-elle pas satisfaite ?  Parce que la demande n'est pas rentable. Le foncier (les terrains) à Bruxelles est rare, donc cher. Lors d'une construction, le prix du terrain est réparti sur les différentes habitations qui y sont établies. Plus on monte d'étages, plus le prix du terrain est réparti et donc plus les prix baissent.  Malheureusement, les communes et la région limitent fortement la hauteur des immeubles. A cela, il faut rajouter un coût de la construction sans cesse en croissance. La multiplication des contraintes (réglementations, normes, etc.) y est pour beaucoup. Le délai des obtentions de permis également (9 à 12 mois pour un permis d'urbanisme sur 1000 Bruxelles). Rajoutons une taxation élevée (précompte immobilier plus élevé que dans les régions voisines). Tous les ingrédients sont donc bien présents pour faire monter le prix de la construction à des montants qui ne permettent pas à des loyers bas d'apparaitre spontanément sur le marché.

Cerise sur le gâteau, les lois censées protéger les locataires font tellement peur aux propriétaires que ceux-ci se protègent en 'filtrant' les candidats locataires et/ou en augmentant les prix/conditions d'accès.

En enlevant les carcans autour du marché, les politiques relanceraient sans frais un marché existant et permettrait à beaucoup plus de gens d'habiter à Bruxelles.

Si, malgré cette suggestion de libéralisation, les politiques veulent continuer à aider les citoyens en difficulté, il existe une autre solution très facile à gérer et extrêmement facile à mettre en place : le chèque logement. Tout citoyen ou toute famille désirant habiter à Bruxelles mais ayant de faibles moyens recevrait un chèque mensuel destiné à l'aider à payer son loyer. L'habitant resterait libre de choisir son habitation sur le marché privé selon ses propres critères. Cette solution a déjà fait ses preuves dans beaucoup d'endroits dans le monde et a même été lancé en Wallonie.

Il s'agit en fait d'une forme d'impôt négatif. En poussant la logique un peu plus loin, il suffirait d'alléger les taux d'imposition (le précompte professionnel que nous payons tous) sur les revenus les plus faibles et nous aurions le même résultat.  L'autre avantage de diminuer les impôts sur les revenus faibles, c'est de ne pas donner l'impression au citoyen d'être assisté. Chaque habitant de notre région payerait alors son habitation avec ses propres revenus sans rien ne demander à personne.

Les deux solutions préconisées ont également le grand intérêt de favoriser la mixité sociale et d'éviter le phénomène de ghetto des grandes constructions de logements sociaux.

Francisco d’Anconia

23 COMMENTS

  1. Certaines des « solutions »émises dans cet article me font penser à ce que décrit Naomi Klein dans « La stratégie du choc ».

    – dérégulation des marchés
    – réduction du taux d?imposition
    – mise en place de chèques « location » destinés à financer des biens privés (=privatisation de l’aide sociale)

    Bref, que du bonheur !

    Ce type de propositions, pour info, ont plongé des états entiers dans une crise difficilement contrôlable et ont creusé incroyablement les écarts riches/pauvres.

  2. Tiens on l’a jamais entendue ni essayée celle-là. En gros on laisse faire le marché, comme c’est beau, un peu ce qui s’est passé pendant pas mal de temps à Bruxelles, non ? et le résultat? des bureaux partout… Je fais partie de cette classe moyenne coincée entre les friqués qui ne regardent pas au prix et les fauchés qui sont subventionnés… et je trouve que les pouvoirs publics n’interviennent pas assez dans le domaine du logement, entre autres social… combien d’immeubles d’habitations sont vides, laissés à pourrir pour dans la plupart des cas satisfaire la spéculation? et combien de m² de bureaux vides? dans des belles tours en plus. C’est là qu’il faut taper, on a trop laissé faire le marché justemment…

  3. Philippe, Dimsum, si on accepte le constat que la politique actuelle est un échec (50000 familles en attente), il serait peut-être temps d’essayer autre chose: Réduire la taxation des plus petits revenus, permettre facilement l’augmentation de l’offre et motiver les propriétaires à mettre des habitations sur le marché.

  4. Oui il y a un manque, oui les pouvoirs publics ne font pas assez… Non il ne faut pas laisser faire plus le marché, il faut plus intervenir. travailler sans doute sur des plus petites unités, simplifier la règlementation, permettre plus de réactivité mais surtout pas donner plus de pouvoir au privé… On a déjà notre politique de mobilité qui est privatisée, on a laissé pendant une grosse trentaine d’année le secteur privé « gérer » l’urbanisme, il est temps que ceux qui sont élus pour représenter la population s’imposent définitivement et continuent les efforts dans l’intérêt de la population…

  5. @ Philippe et dimsun :
    La question n’est pas de tomber dans un libéralisme pur mais d’admettre que la situation actuelle résulte d’un manque certain de libéralisme au contraire.

    Sur la dérégulation des marchés, je vous invite à lire Hayek pour vous confronter à autre chose que la perspective keynésienne.

    Sur la réduction du taux d’imposition, on ne parle pas d’une réduction de tous les taux d’imposition mais plutôt d’un rééquilibrage de ceux-ci. Comme l’article l’explicite bien il faut commencer par reconnaître que les classes moyennes se retrouvent actuellement à s’appauvrir ou à s’enrichir, d’une part du fait de la permissivité envers les plus riches en Belgique comme des subventions massives envers les plus pauvres (de l’argent qu’on va chercher dans les poches des classes moyennes). Le corps intermédiaire disparaît. Bref la subvention politique participe aussi à la création des inégalités, ne vous en déplaise.

    Sur la mise en place chèques location destinés à financer des bien privés : le CPAS finance des biens publics peut-être ?

    Dimsun : si vous laissez faire le marché les vendeurs de bureaux n’ont aucun intérêt à laisser des bureaux vides et à proposer une offre de bureaux qui n’a pas de demande. Les bureaux changent de rôle par eux-mêmes.
    Notez que cette offre massive de bureaux est liée à des lobbys qui ont obtenu des permis de bâtir de la part du public dans cette optique. Et dont je peux dire sans trop me tromper qu’ils sont encouragés pour faire vivre le secteur de la construction.

    Ne parlons donc pas de marché purement libéral, on en est loin.

  6. J’ai tiqué plusieurs fois à la lecture de cet article:

    – « Il est difficile de se loger à Bruxelles ». Ah bon ? Y a pas beaucoup d’offres et elles sont chères ? Tidjap, que doivent dire les londoniens et autres parisiens ? Sérieux, sur Immoweb, y a pléthore d’annonces et pour toutes les bourses.

    – « Les prix montent ». Heu ? Ils stagnent depuis plus de 4 ans, depuis le début de ce qu’on appelle « la crise économique ». Les salaires et les intérêts, eux, n’ont pas cessé d’augmenter de 2% par an. Les prix ont baissé, donc !

    – « Taxation élevée » rapport au précompte immobilier. C’est une plaisanterie ? Les montants sont basés sur des chiffres qui datent de plusieurs décennies…

  7. je trouve toujours plaisant d’entendre des gens se plaindre qu’on est pas dans un vrai système libéral, mais un vrai de vrai hein, où tout est règlé par la main invisble et rien d’autre parce que sinon ça serait parfait… ça me rappelle à chaque fois les staliniens qui se plaignent qu’on a toujours pas essayé le socialisme réel… :D.
    Allez, bonne fin de journée aux porte-paroles du SNP ;)

  8. @ Nicolas : on parle de gens qui sont dans les conditions de demande d’un logement social ou un peu au dessus… Que faut-il dire ? Que Londres et Paris sont des villes de riches et relèguent leurs pauvres dans les banlieues ? Quel est l’argument là : c’est pire ailleurs ? Et après ?
    Sur les salaires laissez-moi rire, par rapport à l’inflation on y perd…

    Dimsun, par marché purement libéral je fais allusion à cette critique continuelle du « libéralisme » qui laisse penser qu’on vit dans un système libéral pur alors que c’est plutôt le contraire ;-) La caricature vous sied mal. Nombre de fois quand j’évoque les effets pervers de l’action publique on me répond par la dérision. Par manque d’arguments j’imagine. Une démarche honnête serait de reconnaître les méfaits de trop de libéralisme comme ceux de trop de réglementation. Il est simple d’admettre que l’imposition massive tue les possibilités consommatrices/innovatrices d’une classe moyenne (pas de consommation ou pas de prise de risque/investissement puisque pas de capital, donc pas d’encouragement des entreprises existantes et pas de réussite, donc pas non plus d’élargissement de l’assiette des richesses), que donc on tue la poule aux oeufs d’or et on entre dans une logique de vie à crédit et de subvention de la pauvreté par une dette qui paie simplement les dépenses courantes.
    N’allez pas me dire que notre imposition des classes moyennes n’est pas déjà assez forte, maintenant.

    Plutôt que favoriser l’accès au logement social il faut favoriser l’accès au logement, et l’accès à la propriété. Mais peut-être que la propriété elle-même doit finir entre les mains de la collectivité pour les bons disciples de Marx ;-) ?

  9. Soyons pragmatiques:
    1. Ce qui existe ne marche pas ou très mal
    2. L’offre est insuffisante
    3. La classe moyenne est de plus en plus exclue

    Comment augmenter l’offre et donner plus de moyens aux habitants les moins aisés ?

    L’article propose des solutions de bon sens ayant fait leur preuves ailleurs.

  10. et voilà, on est tombé, après quelques commentaires « de bon sens » et bien enrobées de politesses, dans le discours (même pas si néo)libéral classique… on se demande bien où est la caricature. A un de ces jours (ou pas)

  11. J’ai relevé pas mal de mots dans l’article et les commentaires qui me font dire qu’on n’est pas dans le registre habituel de bxlblog:

    – offre
    – demande
    – poule aux oeufs d’or
    – possibilités consommatrices
    – motiver les propriétaires
    – rationnement

    humhum… des mots issus de discours (trop) bien connus qui font « tache » parmi les billets progressistes habituellement trouvé ici.

  12. Philippe J, je suis un nouveau contributeur. J’aborde ici un sujet important pour beaucoup de bruxellois dont moi-même. J’apporte un point de vue différent de la vision habituelle mais dans le respect des opinions et de la pluralité.

    Je confirme que je suis pour le progrès. Mais pour moi, le progrès doit améliorer la vie des gens sans être braqué sur une idéologie. Donc, un progrès qui n’hésite pas à remettre en question des dogmes qui ont démontré leur inefficacité. Et n’oubliez pas: les progressistes d’hier sont souvent les réactionnaires d’aujourd’hui ;)

    Et désolé que mon post fasse « tache » ;)

  13. Francisco;
    ton post n’est pas un mal , juste qu’il ne reflette pas tout a fait la réalité.
    je m’explique dans le sens ou y a des logements a Bruxelles et a tout les prix ….
    Mais , car y a un mais !! les quartiers ou le voisinage ne plais pas forcément a tous et toutes , ce qui en fait pénalise plus les familles en recherche de logements et non la sois disant inflation de la demande ……
    on peu parler de tout les sujets, mais on ne lance pas un pavé sans élargir les vrai problématique … sinon c’est juste faire de la politique sans fond …

  14. @Philippe Bxlblog est un blog pluraliste où différents points de vue peuvent se cotoyer sans faire tâche.

    Tout d’abord, le logement social n’est plus la solution pour beaucoup d’acteurs du logement. Il est un des leviers, important certes, mais qui devrait voir son importance diminuer. Construire un logement social prend, en moyenne 5 à 6 ans. Vu les 50.000 familles qui sont en attente, il faut trouver d’autres solutions car c’est beaucoup trop long.

    Je sais, pour avoir travaillé un temps au Cabinet Doulkeridis, que les pistes analysées et testées sont nombreuses.

    Ce billet est intéressant dans le cadre de la discussion autour des pistes à explorer pour répondre aux nombreuses demandes de logement à Bruxelles.

    Libre à toi d’y répondre ici en commentaires ou dans un billet…

  15. Faux pour la libéralisation, et l’Espagne est la preuve: plus de terrain à construire + aides fiscales = prix qui s’envolent pour l’achat et la location (en plus d’une boule immobilière qui a éclaté et remporté le pays dans la merde).

  16. Ce que vous ne dites pas Ramon, c’est bien la double incurie public/privé à la base de ce phénomène :
    1) l’Espagne a donné massivement des permis de bâtir et encouragé les promoteurs et le secteur de la construction (en modifiant la législation du travail dans la construction notamment). Mais où sont les études de marché pendant toutes ces années qui montraient que le marché était engorgé ?
    2) Les banques espagnoles ont elles permis, comme aux Etats-Unis lors de la crise des subprimes de 2008, des prêts à des critères bien loin d’un capital-risque acceptable. En prêtant plus facilement à des possibles insolvables, il fallait s’y attendre.

    La libéralisation ne revient pas à faire n’importe quoi.
    Par ailleurs on ne peut pas comparer la bulle immobilière espagnole qui revient à l’acquisition de la propriété par la construction à la situation bruxelloise où la construction est très limitée et où il s’agit d’inciter à devenir propriétaire et/ou locataire par l’utilisation du parc existant. La question revient surtout à l’incitation à l’offre pour les propriétaires et à des aides pour les locataires. Plus globalement à une possibilité d’amasser un capital de longue haleine pour pouvoir devenir propriétaire quand on fait partie de la classe moyenne plutôt que la terrasser d’impôts.

  17. Je retire le mot tâche qui fait lui même tâche :-)

    Bon, des idées pour améliorer la situation du logement, réfléchissons un peu:

    – Obliger les propriétaires de logements vides à rentrer dans le processus AIS (agence immobilière sociale).
    – Donner un droit de préemption à la région sur tous les logements vides (ne pas faire dépendre ce droit de la localisation, mais bien du fait que le bâtiment est inoccupé depuis un certain délai)
    – Imposer d?avantage les personnes qui vendent à la découpe des logements, afin de décourager cette pratique (si vous ne voyez pas de quoi je parle, je peux étayer)
    – Mettre en place la possibilité d?achat groupé (avec facilité urbanistiques pour les premiers acquéreurs qui souhaitent acheter à plusieurs et qui doivent avoir l?assurance qu?un bien pourra être scindé)
    – Protéger les futurs acheteurs (expertise obligatoire avant mise en vente au frais du vendeur, délais de rétractation de 15 jours au bénéfice de l?acheteur, mise en conformité électrique obligatoire avant mise en vente au frais du vendeur)
    – Instaurer un loyer maximum au mètre carré. Proposer en compensation, pour les propriétaires qui souhaiteraient néanmoins louer à des loyers supérieurs, d?entrer dans une catégorie (à créer) « logement de luxe » qui serait elle plus imposée.

    Voilà quelques pistes, et encore je n?ai pas creusé longtemps.

    C?est tout sauf de la libéralisation.

    J?aurai, bientôt j?espère, d?autres pistes à proposer.

  18. Je vais tenter d’évoquer un peu ce qu’est le libéralisme parce que vous citez fort souvent ce mot sans aucun développement. Il me semble pertinent de réfléchir de manière plus générale aux conceptions sociétales qui sous-tendent vos propositions (surtout les deux premières) pour enrichir le débat sur les mesures à adopter.

    « Obliger les propriétaires de logements vides », « donner un droit de préemption sur les logements vides ». Ce que vous venez de nous proposer est en définitive l’asservissement dans un but collectif. A chaque fois que je lis ce genre de formule je repense à Karl Popper, particulièrement pertinent à cet égard :
    « Je suis resté socialiste pendant plusieurs années encore, même après mon refus du marxisme. Et si la confrontation du socialisme et de la liberté individuelle était réalisable, je serais socialiste aujourd’hui encore. Car rien de mieux que de vivre une vie modeste, simple et libre dans une société égalitaire. Il me fallut du temps avant de réaliser que ce n’était qu’un beau rêve; que la liberté importe davantage que l’égalité; que la tentative d’instaurer l’égalité met la liberté en danger; et que, à sacrifier la liberté, on ne fait même pas régner l’égalité parmi ceux qu’on a asservis. »

    Si on reprend l’idée de la vitre cassée de Bastiat (dans l’économie il y a ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas), votre préemption profite peut-être directement à une certaine catégorie de population mais vous empêchez à la catégorie que vous spoliez toute utilisation autre et différenciée de son bien.

    Au delà du problème économique cela pose un vrai problème moral. Déjà présent dans la redistribution sociale mais qui devient impossible à assumer dès lors que vous l’exacerbez et que vous le portez à son paroxysme par la spoliation totale. Cela s’apparente à du vol. Un exemple assez commun : si j’ai envie d’avoir 2 logements que je peux payer parce que j’aime être propriétaire foncier et avoir 2 chez-moi, passer de l’un à l’autre quand bon me semble, pourquoi ne pourrais-je plus avoir ce droit ? Alors que j’ai acquis ce logement en travaillant, et qu’il est le résultat du travail d’une vie ? Du jour au lendemain il devrait être mis sous tutelle ? En quel honneur ?

    Ce qui est pire c’est que vous induisez un mécanisme ultra pervers qui est la tentation de ne plus rien posséder puisque plus rien ne peut être possédé en définitive (la possession induisant non seulement l’impôt mais surtout la préemption). Pourquoi donc vouloir travailler, innover, avoir un petit quelque chose à vous et donc tout simplement s’épanouir en se projetant, en ayant des projets, puisque l’Etat surpuissant mettra de toute façon la main in fine sur votre « vous », vos réalisations. Les régimes qui ont poussé le plus loin ce mécanisme ont été jusqu’à obliger les gens à penser d’une certaine manière ou à ne plus les faire penser du tout. C’est le régime de l’immédiateté et de la soumission (Muray dénonce ainsi en France l’actuel empire du Bien marqué par son festivisme). Notez que la démocratie de même que tout le raisonnement scientifique, que vous aimez j’en suis sûr, reposent sur la confrontation d’un pluralisme d’opinions, opinions qui ne sont que le résultat d’une libéralisation de la pensée.
    D’où vient la Renaissance si ce n’est de l’acceptation de l’homme en tant qu’être des possibles ?

    On sent les bases idéologiques sous-jacentes. Vous touchez le problème fondamental du marxisme, sa contradiction originelle. On redistribue les créations des autres mais on ne réfléchit pas à ce qui induit la création. Et ne dites pas que la création pourrait être un acte gratuit en faveur de la collectivité. L’humain est ainsi fait que l’acte gratuit ne lui est possible qu’à partir du moment où il n’est plus dans le besoin, le besoin étant une notion volatile. Rappelez-vous les moines travailleurs des abbayes (il est illustratif à cet égard qu’on mette en évidence la composante bourgeois bohème et non pas ouvrière des électeurs du Front de gauche en France par exemple). Ne vous en déplaise l’art de la peinture s’est développé parce que la peinture se vendait et que des gens trouvaient ce moyen pour vivre.

    La question n’est pas qu’il ne faille pas de redistribution et de rééquilibre des richesses créées, les vrais libéraux proposent ce rééquilibrage : rien n’empêche par exemple d’imaginer un chômage par capitalisation dans un Etat de droit libéral, un chômage qui permette la transition mais qui fonctionne sur des résultats réels, de plus dans une société libérale l’association civile et ses créations de solidarité ont la part belle par rapport au tout à l’Etat. Rien n’empêche des mécanismes de redistribution divers et variés.
    La question est que la gauche réfléchit d’abord à la redistribution et puis à l’élargissement de l’assiette des richesses (quand elle y réfléchit). Tandis que le libéral aura plutôt tendance à d’abord vouloir élargir l’assiette des richesses (avec une démarche de profit personnel qui ne peut se réaliser que dans l’échange et la confrontation avec la démarche de profit personnel du tiers) et puis seulement à la redistribuer (là il est bien sûr tout à fait pertinent de citer ses excès égoïstes, mais égoïsme n’est pas individualisme, critiquer un excès ne doit pas revenir à en prôner un autre).
    Ces idées marxistes se sont tellement ancrées qu’on voit maintenant fleurir (expression heureuse en l’occurrence du fait de leur lien avec la nécessité de planification écologique) des mouvements de la décroissance, dignes héritages de pensées marxistes. Mouvements qui sont pertinents et utiles dans le sens où ils pointent du doigt une logique de non-exagération mais qui sont dangereux en n’étant que des architectes de la collectivisation.

    Ne parlez pas du libéralisme comme si c’était un système à rejeter par essence ou admettez que derrière votre souci de partager des ressources il y a un désir autoritaire comme une jalousie du possédant qui ne porte pas son nom.
    Si ce n’est dans les régimes collectivistes purs, on est toujours le riche de quelqu’un. Appauvrir l’autre ne vous rendra pas riche. C’est valable pour les excès dans les deux sens.

  19. J’ai bien relu ce que j’avais écrit, je n’ai pas parlé de libéralisme mais bien de libéralisation (sous entendu des marchés). Il me semblait que l?article traitait de cela, cfr. « Si, malgré cette suggestion de libéralisation, les politiques veulent continuer à aider les citoyens en difficulté [?] ». Enfin soit…

    Quelques réflexions:

    – la proposition de droit de préemption/agence immobilière sociale ne s’appliquerait qu’aux logements vides (abandonnés depuis un certain temps). Je ne vois pas en quoi cela empêche quelqu’un d’avoir deux lieux de vie (donc deux lieux qui ne sont *pas* vides).

    – je ne suis par ailleurs pas convaincu qu’en l’état actuel (démographie) il faille défendre à tout prix la possibilité pour quelqu’un d’avoir plusieurs logements. Je pose vraiment la question. Elle est particulièrement aiguë sur Bruxelles.

    – les ressources sont limitées (lois de la physique), comment tenir compte de cela face à l’augmentation de la population?

    – la liberté vs le droit au logement, lequel prime ? Est-on vraiment libre quand on se bat pour garder un logement ou en avoir un moins précaire ? Quand on se retrouve à la rue ?

    – je vous parlerais bien du fait qu?on est, en tant que société humaine, obligés de mettre des limites (par exemple les limitations de vitesse), et qu’il semble envisageable de mettre des limites dans d’autres domaines. Tout comme au nom de ma liberté individuelle je ne peux pas faire du 300 km/h sur l?autoroute, je n?ai peut-être pas la « liberté » de monopoliser un espace excessif sous forme de logement inoccupé m?appartenant. Question d’idéologie? Pour moi c’est plutôt de la logique (ou de la morale? quand on dit « ma liberté s’arrête là ou celle de l’autre commence »).

    Par ailleurs vous ne répondez pas aux autres propositions.

  20. Je ne comprends pas du tout votre différenciation libéralisme/libéralisation. L’un renvoie à la pensée philosophique, l’autre à l’action économique. Ils sont intimement liés.

    – Qu’est-ce que vous entendez par logement vide de ce fait ? Logement saisi, logement récupéré par l’Etat en cas de succession ? Si oui ce n’est que de la tambouille intra-étatique pour les convertir en logement.
    Si non, quels critères de préemption ? Parce que mon raisonnement peut très bien s’appliquer à quelqu’un qui a deux logements et ne va pas dans le second pendant un an, deux ans, etc. Dans tous les cas à un moment donné vous décidez de préempter de manière autoritaire, quels que soient les critères.
    Je trouve fou qu’on imagine regarder la faible consommation d’eau de privés pour imaginer leur prendre leurs biens. Dans quelle logique on entre là ?
    Il y a un monde entre la préemption pénale et la préemption sociale. Et il commence par la culpabilité.

    – Le problème de Bruxelles est son apport massif d’immigrés pauvres auquel on ajoute une incitation démesurée des naissances par des allocations familiales non dégressives (c’est ce qui fait tenir la démographie belge dans son ensemble puisque comme vous le savez notre population du baby boom est vieillissante). Ceux-ci n’ont pas les moyens d’acquérir par les moyens traditionnels un logement et du fait de leur culture mais aussi de leur statut ont tendance à faire plus d’enfants que nécessaires, sans jugement aucun d’ailleurs mais il faut noter que les familles belges présentes depuis plus longtemps sont passées de 4/5 enfants à 3/2/1 enfants et je lie directement ce phénomène aux taux d’imposition faramineux qu’on met sur la classe moyenne. En effet, celle-ci imagine le futur de ses enfants et le prépare. Comme elle veut garder un niveau de vie tout en se gardant un capital pour l’avenir, elle fait moins d’enfants en conséquence.
    Bien évidemment qu’avec toute la bonne volonté du monde il n’est pas possible de suivre cette croissance pour l’intérieur de Bruxelles. De là à commencer à spolier les gens de leurs biens, je ne vous suis pas…

    Le phénomène a un caractère démesuré. J’ai lu fortuitement un article de Lalibre hier (http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/744947/combien-de-demandes-d-asile-ont-ete-acceptees-en-belgique-l-an-dernier.html) qui nous dit que nous avons accueilli durant l’année 2011 sur le territoire 5500 demandeurs d’asile pour de multiples raisons. Ce qui fait seulement 18% de nos demandes d’asile. Le chiffre n’est pas énorme, à vrai dire je m’attendais à plus. En revanche, tenez-vous bien, la France fait seulement 2 fois plus et la Grande-Bretagne et l’Allemagne seulement 3 fois plus. En proportion par rapport à la population et au territoire nous sommes champions. Et c’est sans compter les clandestins/sans-papiers, les chiffres du regroupement familial etc.

    De fait que proposez-vous ? De limiter au logement unique ? Vous voyez comme de l’idée qu’il manque des logements à Bruxelles on passe déjà à l’idée arbitraire qu’il faut imposer un logement unique à tout le monde ?
    Je vais être ostensiblement provocateur, je connais des hommes de savoir qui ont une deuxième maison-bibliothèque. Vous allez faire quoi dès lors ? Leur retirer ? Après tout, nécessité fait loi ? Allons y créons des lois restrictives qui spolient les logements uniquement dans certains cas ? Et si vous faites ca, aurez-vous récupéré assez de logements ? Quel est le prochain qui restreindra quelle liberté ou diminuera quelle critère pour spolier toujours plus de logements ? (n’oubliez jamais qu’il y a ce qui se voit et ce qui se ne voit pas, quand vous commencez à spolier des logements privés pour les redistribuer nul ne sait où l’on va s’arrêter).
    J’ai personnellement quelques problèmes à concevoir qu’on ne soumette pas les primo-arrivants aux mêmes règles que les locaux. C’est tout le contraire d’un Etat de droit libéral. J’explique largement la situation actuelle par notre incitation massive et assumée à l’immigration tandis que notre classe moyenne croule sous les impôts (un des plus élevés taux d’imposition d’Europe). C’est une situation déséquilibrée. Nous avons créé la situation démographique dans laquelle nous nous trouvons et nous continuons à aller dans cette voie.

    – Posez la question autrement. Pourquoi une telle augmentation de population à Bruxelles, quelles ressources elle a, pourquoi elle ne rentre pas dans le marché du logement, etc. Par ailleurs, les ressources physiques limitées, j’assume ce genre de raisonnement pour l’eau douce mais c’est bien tout.

    – En parlant de préemption vous n’êtes plus dans un équilibre entre la liberté et le droit au logement mais bien dans un unique droit au logement et à la disparition de la liberté. Il n’y a qu’un pas au « Venez en Belgique, logement gratuit pour tout le monde ». Par ailleurs ca rejoint ma réflexion sur l’immigration qui prend de telles proportions qu’elle ne s’intègre plus et n’a pas d’avenir.
    Se retrouver à la rue peut dépendre aussi d’une mauvaise gestion de ses finances et d’une vie au dessus de ses moyens. Ici encore je reviens sur le gros problème de l’immigration pauvre.
    L’Etat providence taxe tellement sa taxe moyenne qu’elle ne lui permet pas de créer un tissu de PME qui pourrait donner du boulot à tous ces gens, ca casse à un moment donné.
    Vous posez le problème moral qui est de ne pas laisser quelqu’un à la rue. Laissez-moi poser le problème moral qui est de voler quelqu’un qui fait attention à ses finances pour les donner à quelqu’un dont on n’est pas sur qu’il en ait la même attention voire quelqu’un qui n’en a que faire.
    In fine la meilleure solution est en premier la création d’activités pour en faire profiter les pauvres, en second la redistribution pour éviter un creusement des inégalités. Mais cela on peut le faire via des systèmes de marché et non par des systèmes étatiques forcément plus partiaux. Ce que j’essaye de vous expliquer c’est que ce n’est pas le processus du marché en lui-même qui est maléfique. L’idée c’est que le marché est un agrégat d’une multiplicité d’informations individuelles et qu’il est donc toujours plus éclairé qu’une décision d’un groupement politique souvent idéologisé qui répond à d’autres préoccupations que celles de maximiser une somme de profits personnels. Je l’ai déjà dit je pense mais on peut très bien imaginer un système de chômage par capitalisation où les acteurs économiques ont tout intérêt à ce que les gens sortent du chômage pour investir leurs entreprises, à la fois parce qu’ils sont consommateurs, à la fois parce qu’ils sont travailleurs, et ainsi de suite. Le marché a tout intérêt à la confiance et non le contraire.

    – J’ai bien compris votre raisonnement. Et vous notez d’ailleurs votre envie de limitations dans d’autres domaines, dixit. C’est ce raisonnement qui conduit à la collectivisation et au totalitarisme d’un petit groupe de décideurs sur la vie de chacun. Système égalitaire certes, mais de quelle égalité on parle ? Je ne suis personnellement pas fan des tentatives qui ont été tentées…

    Comme vous l’avez remarqué j’ai réagi à vos propositions de préemption et pas les autres, parce que je considère les suivantes plus acceptables (l’incitation à l’achat groupé par exemple est pas mal comme idée).
    Ma liberté s’arrête là ou celle de l’autre commence, exactement. En faisant de la préemption je vous dis juste que vous évitez de rendre cette phrase vraie ;-)

  21. Le logement social sous sa forme actuelle n?est pas une solution, car :
    – C?est un gouffre financier intenable à terme. Toutes les sociétés de logement sociales sont déficitaires et criblés de dette. Leur structure est lourde et chère.
    – Ne favorise pas le comportement responsable des locataires. Cela et la cause des frais d?entretien et réparation colossaux
    – La rotation des locataires qui serait souhaitable en cas de changement de situation familiales ou financière est difficile, voir impossible, car de couples âgées, après le départ de leurs enfants, rechignent à quitter leur foyer, préférant de payer un supplément de loyer
    Au contraire, il faut progressivement réduire et puis totalement éliminer le logement social et faciliter l?accès à la propriété, à l?exemple de la politique de SRDB, via des prêts avantageux et conditions strictes.

  22. Agence Lebrun est une agence immobilière qui propose l’approche incomparable vers disposition de la propriété. L’installation permet aux propriétaires de vendre ou de louer leurs propriétés existantes à des prix rémunérateurs. Toute la campagne est guidé par des agents qui sont expérimentés ainsi assez confiant traiter des questions en rapport avec le transfert de propriété sous l’?il de la loi en France.

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