BIFFF : La peur en tant que catharsis collective

Le BIFFF, créé en 1983, est un festival qui est considéré comme une institution dans son genre, au même titre que le Festival de Sitges de Catalogne (1967), le FantaFestival en Italie (1981)  ou le FantasPorto au Portugal (1982), pour ne citer que les plus anciens.

Joe Dante
Joe Dante (The Howling, Gremlins)

Cette trente-troisième édition, qui s’est déroulée au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, 125 films ont été présentés et a eue comme invité d’honneur Joe Dante (Piranha, 1978; The Howling, 1981; Gremlins,(1984) qui présentait Burying The Ex (2014), tandis que le jury pouvait compter parmi ses membres le déjà primé Richard Stanley (Hardware, 1990).

Ce genre ne connaît pas la crise du cinéma, tant Bruxelles semble se mettre « au service » du BIFFF durant les deux semaines du festival: des zombies qui envahissent les rues de la ville, un traditionnel  « Bal de vampires », des activités culturelles, des conférences et des concerts autour du festival, avec l‘appui impressionnant de tous les médias de communication bruxellois ! : La radio et la télévision transmettent chaque jour en direct depuis le Festival.

Cyborg girl
Cyborg girl Clôture BIFFF 2015

Le public du BIFFF est un public de connaisseurs et spécialistes, connu pour sa rigueur et son interaction complice avec les films. Ceux-ci sont parsemés d?applaudissements quand vient l’action,  de cris et hurlement face à une scène de « pleine lune », ou simplement des commentaires satisfaits ou critiques, voire mêmes des bâillements si un des films est considéré comme mauvais.Les directeurs de films présents peuvent donc se faire une idée rapide du succès de leur ?uvre.

Diego Cohen -HoneyMoon

Mais en dehors de tout ceci, l’ambiance vécue quotidiennement au BIFFF est plus proche d’une catharsis  face aux scènes et trames de véritable terreur. La sensation de peur, comme l’affirme le directeur mexicain Diego Cohen, qui présentait en avant-première mondiale « Luna de miel »(2015), se transforme ainsi en une catharsis collective.

Dans ce sens, les films appartenant au genre de l’horreur, la science-fiction et du suspense (thrillers) reflètent les peurs d’une société, et nombre des histoires classiques sont fondées sur des mythes et légendes profondément enracinées dans la culture traditionnelle de chaque société, tels que les vampires, les démons, les sorcières et les phénomènes paranormaux. Mais ils sont aussi le reflet  de nos peurs envers nous-mêmes et de ce que nous sommes capables de faire dans des situations extrêmes, telles que les histoires de déviance psychologique, les assassinats, les viols et tortures.

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Cthulhu Monstre humanoïde imaginée par H. P. Lovecraft dans la nouvelle L’Appel de Cthulhu (1926).

Mais pourquoi la peur, en tant qu’expression artistique, a tant de succès, et pas seulement au cinéma? Rappelons que le genre « terreur » est aussi magnifiquement représenté en littérature par Edgar Allan Poe, Howard Phillips Lovecraft ou Stephen King, par exemple.Depuis Aristote jusqu’à Bauman, en passant par Freud, Sartre et Arendt, la peur, ce phénomène psycho-biologique instinctif, a été un thème d’étude clé pour comprendre le comportement socioculturel de l’être humain.

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The Scream – Edvard Munch

Aristote définit la peur comme une passion (pathos), un mélange de douleur et de plaisir qui bien contrôlée peut se convertir en vertu qui éviterait la douleur pour augmenter le plaisir (2003, 2009).Dans le sens aristotélicien, la peur comme recours créatif ou en tant qu’expression artistique, se transformerait en « vertu » pour contrôler les extrêmes de celle-ci, à savoir la lâcheté et la témérité.

C’est peut-être ce dernier point qui expliquerait l’énorme succès du film fantastique (englobant ici les genres de science-fiction, suspense et d’horreur) dans le monde: faire face à nos peurs pour atteindre une catharsis qui nous permettrait de lutter contre les constants dangers auxquels nous devons faire face quotidiennement.

Et voilà pourquoi nous attendons avec impatience chaque année le BIFFF et libérer ainsi le plaisir de ressentir de la peur dans une ambiance plus que fantastique !

Mes Top du BIFFF 2015

Musarañas – Juanfer Andrés y Esteban Roel (Espagne/Mexique)

The infinite man – Hugh Sullivan (Australie)

México Barbaro – Isaac Ezban (Mexique)

Liza, The Fox Fairy – Karoly Ujj-Meszaros (Hongrie)

Frankenstein – Bernard Rose (Grande Bretagne)

One on One – Kim Ki-Duk (Corée du Sud)

Luna de Miel – Diego Cohen (Mexique)

Lost Soul: The Doomed Journey of Richard Stanley?s Island of Dr. Moreau  Richard Stanley (Afrique du Sud)

Goodnight Mommy  – Severin Fiala y Veronika Franz (Autriche)

Therapy for a Vampire David Rühm (Autriche)

La isla mínima Alberto Rodríguez (Espagne)

Prix BIFFF 2015

Le Jury International du BIFFF 2015 representé par Richard Stanley, Andy Muschietti, Timo Vuorensola et Jonas Govaerts: Corbeau d?Or -Frankenstein- Bernard Rose Corbeau d?Argent – The Infinite Man -Hugh Sullivan Corbeau d?Argent – Goodnight Mommy -Veronika Franz et Severin Fiala

 

Juanfer Andrés y Esteban Roel
Juanfer Andrés/ Esteban Roel Spéciale Mention pour la direction artistique Shrew?s Nest
Prix 7e Parallèle Karoly Ujj-Meszaros Liza, The Fox Fairy
Karoly Ujj-Meszaros – Prix 7e Parallèle Liza,The Fox-Fairy

 

1 COMMENT

  1. Chouette article.

    Chouette ambiance, chouettes invités.
    Perso, j’y fais le plein de comico-gores et wtfesques.

    Le BIFFF, c’est magique. Encore 11 mois à attendre.

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